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Foi Bible
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Avec le Père Jacques Tersou, de Tulle, nous te proposons de partir à la découverte du livre de la Genèse, par étapes successives, en rêvant le récit de la Création avec ceux qui l'ont écrit.
Isaac, sourire de Dieu
À M. Nahor
fils de Tèrah
Harân
Mésopotamie
Abraham confie deux tablettes d’argile enveloppées d’une bande de tissus en poils de chèvres à un marchand d’Hébron qui part pour la Mésopotamie.
Il a payé le transport avec quelques chèvres qui serviront de nourriture à la caravane qui se met en route.
Il veut faire porter à son frère resté au pays et à toute sa famille la nouvelle de la naissance inespérée d’un fils qui lui est un cadeau de Dieu.
C’est de la plus extrême importance parce que cette annonce prépare de très loin une demande en mariage.
Mais revenons aux tablettes d’argile qu’Abraham a fait graver par un scribe d’Hébron. Il y raconte que YHWH, son Dieu, lui est apparu au chêne de Mambré tandis qu’il était assis à l’entrée de la tente.
Il leva les yeux et aperçut trois hommes debout près de lui. À leur vue, il courut de l’entrée de la tente à leur rencontre, se prosterna à terre et dit : « Mon Seigneur, si j’ai pu trouver grâce à tes yeux, veuille ne pas passer loin de ton serviteur. Qu’on apporte un peu d’eau pour vous laver les pieds, et reposez-vous sous cet arbre. Je vais apporter un morceau de pain pour vous réconforter avant que vous alliez plus loin, puisque vous êtes passés près de votre serviteur. » Ils répondirent : « Fais comme tu l’as dit. » Abraham se hâta vers la tente pour dire à Sara : « Vite ! Pétris trois mesures de fleur de farine et fais des galettes ! » et il courut au troupeau en prendre un veau bien tendre. Il le donna au garçon qui se hâta de l’apprêter. Il prit du caillé, du lait et le veau préparé qu’il p laça devant eux ; il se tenait sous l’arbre, debout près d’eux. Ils mangèrent et lui dirent : « Où est Sara, ta femme ? » Il répondit : « Là, dans la tente. » Le SEIGNEUR reprit : « Je dois revenir au temps du renouveau et voici que Sara ta femme aura un fils. » Or Sara écoutait à l’entrée de la tente, derrière lui. Abraham et Sara étaient vieux, avancés en âge, et Sara avait cessé d’avoir ce qu’ont les femmes. Sara se mit à rire en elle-même et dit : « Toute usée comme je suis, pourrais-je encore jouir ? Et mon maître est si vieux ! » Le SEIGNEUR dit à Abraham : « Pourquoi ce rire de Sara ? Et cette question : ‘Pourrais-je vraiment enfanter, moi qui suis si vieille ?’ Y a-t-il une chose trop prodigieuse pour le SEIGNEUR ? À la date où je reviendrai verse toi, au temps du renouveau, Sara aura un fils. » Sara nia en disant : « Je n’ai pas ri », car elle avait peur. « Si ! reprit-il, tu as bel et bien ri. » Gen. 18, 2-15
Le SEIGNEUR intervint en faveur de Sara comme il l’avait dit, il agit envers elle selon sa parole. Elle devint enceinte et donna un fils à Abraham en sa vieillesse à la date que Dieu lui avait dite. Abraham appela Isaac le fils qui lui était né, celui que Sara lui avait enfanté. Il circoncit son fils Isaac à l’âge de huit jours comme Dieu le lui avait prescrit. Abraham avait cent ans quand lui naquit son fils Isaac.
Sara s’écria : « Dieu m’a donné sujet de rire !
Quiconque l’apprendra rira à mon sujet. »
Elle reprit : « Qui aurait dit à Abraham que Sara allaiterait des fils ? Et j’ai donné un fils à sa vieillesse ! »
L’enfant grandit et fut sevré. Abraham fit un grand festin le jour où Isaac fut sevré. Gen. 21, 1-8
En bon français, Isaac veut dire quelque chose comme « Dieu sourit ».
Ce sourire de Dieu,
ce cadeau de Dieu,
que faut-il en faire ?
La question se pose parce que pendant longtemps, pendant des siècles, l’enfant premier né, surtout si c’est un garçon, appartient à Dieu et, chez les peuples du Proche Orient, on pense s’attacher Dieu en lui donnant un fils premier né. On pense lier Dieu en lui donnant son fils premier né.
Ainsi, au temps d’Achab, roi de Samarie, vers 850 avant Jésus Christ, le premier livre des rois, au chapitre 16, verset 34 :
« De son temps, Hiel de Béthel fortifia Jéricho : au prix d’Aviram, son premier né, il en posa les fondations, et au prix de Ségouv, son cadet, il en fixa les portes, selon la parole que le Seigneur avait dite par l’intermédiaire de Josué, fils de Noun. »
On paye Dieu pour qu’il fasse ensuite ce qu’on attend de lui, ce qu’on exige de lui. Alors les scribes nous racontent cette histoire :
Dieu mit Abraham à l’épreuve et lui dit : ‘Abraham’ ; il répondit : ‘Me voici’. Il reprit : ‘Prends ton fils, ton unique, Isaac, que tu aimes. Pars pour le pays de Moriyya et là, tu l’offriras en holocauste sur celle des montagnes que je t’indiquerai. » Gen. 22, 1-2
L’histoire d’un Dieu qui éprouve la confiance d’Abraham en lui demandant de lui offrir en holocauste son fils Isaac. Ce n’est pas d’une petite offrande symbolique qu’il s’agit mais de mise à mort et de passage par le feu.
Mais derrière une question de confiance et de foi, il y a plus. Est-ce qu’Abraham, en sacrifiant ainsi son fils premier né va exiger de Dieu une fécondité plus grande encore ou bien va-t-il laisser Dieu faire pour le mieux ?
Est-ce qu’Abraham, en sacrifiant ainsi son fils premier né va marchander avec Dieu pour obtenir plus encore ou bien va-t-il simplement recevoir ce que Dieu donne comme cadeau ? En fait est-ce que, au prix de son fils Abraham va pouvoir mettre Dieu à son service, ou bien, en recevant Isaac va-t-il se mettre au service de ce Dieu capable de tels cadeaux ?
L’histoire se continue, le conte est bien ficelé :
Abraham se leva de bon matin, sangla son âne, prit avec lui deux de ses jeunes gens et son fils Isaac. Il fendit les bûches pour l’holocauste. Il partit vers le lieu que Dieu lui avait indiqué. Le troisième jour, il leva les yeux et vit de loin ce lieu. Gen. 22, 3-4
Personne ne se doute de rien mais la tension monte :
Abraham dit aux jeunes gens : « Demeurez ici, vous, avec l’âne ; moi et le jeune homme, nous irons là-bas nous prosterner ; puis nous reviendrons vers vous. » Abraham prit les bûches pour l’holocauste et en chargea son fils Isaac ; il prit en main la pierre à feu et le couteau, et tous deux s’en allèrent ensemble. Isaac parla à son père Abraham : « Mon père », dit-il, et Abraham répondit : « Me voici, mon fils. » Il reprit : « Voici le feu et les bûches ; où est l’agneau pour l’holocauste ? » Gen. 22, 5-7
Isaac commence bien à se poser des questions mais Abraham répond sans répondre et nous, nous avons compris depuis un bon moment déjà :
Abraham répondit : « Dieu saura voir l’agneau pour l’holocauste, mon fils. » Tous deux continuèrent à aller ensemble. Lorsqu’ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait indiqué, Abraham y éleva un autel et disposa les bûches. » Gen. 22, 8-9a
Le drame est noué, l’enfant est lié :
Il lia son fils Isaac et le mit sur l’autel au-dessus des bûches. Abraham tendit la main pour prendre le couteau et immoler son fils. Alors l’ange du SEIGNEUR l’appela du ciel et cria : « Abraham ! Abraham ! » Il répondit : « Me voici. » Gen. 9b-11
Une fois de plus, Abraham est disponible, mais pour quel Dieu ?
Il reprit : « N’étends pas la main sur le jeune homme. Ne lui fais rien, car maintenant, je sais que tu crains Dieu, toi qui n’as pas épargné ton fils unique pour moi. » Gen. 22, 12
Soulagement pour le lecteur ! Isaac ne sera pas mis à mort, le vieil Abraham conserve son fils mais surtout, surtout, Dieu n’a rien d’un tyran sanguinaire
et Dieu ne laisse personne mettre la main sur lui et sur ses cadeaux.
Il est Dieu. Infiniment Dieu, et même le sang du fils aîné ne peut l’attacher à la volonté de l’homme.
Alors cette histoire nous arrive pour mieux enfoncer le clou de la promesse.
Abraham leva les yeux, il regarda, et voici qu’un bélier était pris par les cornes dans un fourré. Il alla le prendre pour l’offrir en holocauste à la place de son fils. Abraham nomma ce lieu « le SEIGNEUR voit » ; aussi, dit-on aujourd’hui : « c’est sur la montagne que le SEIGNEUR est vu ». L’ange du SEIGNEUR appela Abraham du ciel une seconde fois et dit : « Je le jure par moi-même, oracle du SEIGNEUR. Parce que tu as fait cela et n’as pas épargné ton fils unique, je m’engage à te bénir, et à faire proliférer ta descendance autant que les étoiles du ciel et le sable du bord de la mer. Ta descendance occupera la Porte de ses ennemis ; c’est en elle que se béniront toutes les nations de la terre parce que tu as écouté ma voix. »
Abraham revint vers les jeunes gens ; ils se levèrent et partirent ensemble pour Béer-Shéva. Abraham habita à Béer-Shéva. » Gen. 22, 13-19.
Une fois de plus, Abraham nous est présenté comme celui qui croit assez pour laisser Dieu guider sa vie. Mais le Dieu qui guide sa vie est un dieu du bien et non un tyran caractériel qui s’amuse des hommes du haut d’un ciel inaccessible.
Abraham laisse Dieu guider sa vie, ça ne l’empêche pas de se préoccuper du mariage de son fils. Encore un texte superbe, mais cette fois plein de douceur et de sérénité, comme si le vieil Abraham ayant enfin « entrevu » la vérité de Dieu pouvait finir paisiblement ses jours.
Abram était vieux, avancé en âge, et le Seigneur l’avait béni en tout. Abraham dit au plus ancien serviteur de sa maison, qui régissait tous ses biens : « mets ta main sous ma cuisse et jure-moi par le Seigneur, Dieu du ciel et Dieu de la terre, que tu ne feras pas épouser à mon fils une fille des Cananéens parmi lesquels j’habite. Mais tu iras dans mon pays et dans ma famille prendre une femme pour Isaac. » Gen. 21, 1-4
Le régisseur, au bout d’un long voyage, trouve Rebecca, fille de Béthuel, fils de Nahor, le frère d’Abraham.
La jeune fille était charmante à voir ; elle était vierge et nul homme ne l’avait connue. Elle descendit vers la source, remplit sa cruche et remonta. Le serviteur courut à sa rencontre et dit : « De grâce, donne-moi à boire une gorgée d’eau de ta cruche. » - « Bois, mon seigneur », répondit-elle et, de la main, elle abaissa la cruche au plus vite pour le désaltérer. Quand elle eut fini de le faire boire, elle dit : « Pour tes chameaux aussi, j’irai puiser jusqu’à ce qu’ils aient bu à leur soif. » Elle s’empressa de vider la cruche dans l’abreuvoir et courut de nouveau chercher de l’eau au puits ; elle puisa pour tous les chameaux. Cet homme la suivait des yeux, silencieux pour savoir si oui ou non le SEIGNEUR avait fait réussir son voyage. Gen. 24, 16-21
Après l’inévitable marchandage pour obtenir l’accord des parents de la jeune fille, un repas et une nuit de repos :
Rébecca se leva avec ses servantes. Elles montèrent sur les chameaux et suivirent l’homme. Le serviteur prit Rébecca et partit..
Écoutez comment le livre de la Genèse nous raconte la rencontre de Rébecca et Isaac, avec simplicité et tendresse… l’auteur sait ce qu’il en est d’être amoureux !
Au coucher du soleil, Isaac s’en revenait au puits de Lahaï-Roï. Il habitait alors dans la région du Néguev et était sorti se promener dans la campagne à la tombée du soir. Il leva les yeux et vit les chameaux qui arrivaient. Rébecca leva les yeux, vit Isaac, sauta du chameau et dit au serviteur : « Quel est cet homme qui marche dans la campagne à notre rencontre ? » - « C’est mon maître », répondit-il. Elle prit son voile et s’en couvrit. Le serviteur raconta à Isaac tout ce qu’il avait fait. Isaac la fit entrer dans sa tente. Il avait eu Sara pour mère ; il prit Rébecca et elle devint sa femme.
Isaac l’aima et fut réconforté après la disparition de sa mère. Gen 24, 61-67
On a l’impression de lire un conte de fée, mais on peut aussi savourer la prévenance et la tendresse de Dieu qui conduit à son alliance de génération en génération, jusqu’à une autre jeune fille qui acceptera un jour d’être la mère du fils de Dieu et qui acceptera, 30 ans plus tard, au pied de la croix, d’être la mère de l’Église, cette part d’humanité chargée de témoigner auprès de tous les hommes que Dieu est Amour.
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